Le fil d’arrivée de l’île du Nord se rapprochait jour après jour et c’était vraiment difficile de réaliser tout ce qui a pu se passer en si peu de temps. Plus de deux mois venaient de défiler sous nos pieds en un claquement de doigts. Les premiers 1000 km ont passés si rapidement que nos corps ont dû suivre sans poser de questions.
Je n’aurais jamais pensé escalader un volcan dans ma vie, surtout pas le populaire Mount Doom du Seigneur des anneaux, et non plus de le descendre en faisant du ski! Le Tongario Alpine Crossing a été une expérience vraiment dépaysante, et je vous la conseille sans hésiter ! Mais, marcher sur la Te Araroa, c’est plus que des volcans…
C’est une odyssée à travers un pays, mais surtout à travers soi-même. Je réalise tellement à quel point il est difficile de vivre le moment présent, à quel point le passé et le futur nous obsèdent quant au fond, ils n’existent même pas ! Marcher chaque jour à travers de difficiles forêts, de longues routes ou bien de dangereuses montagnes me font réaliser que le seul moment qui existe, c’est le moment présent !
Le moment présent
Par contre, l’insécurité de notre ego revient au galop pour nous faire miroiter l’illusion du « Je » façonnée par notre passé et le « dont bien mieux futur » qui ne sera jamais vraiment meilleur. Le combat est difficile, mais je compte bien le gagner ! Bref, il faut vivre à l’instant même, c’est le seul moment qui existe vraiment !
La simplicité dans le compliqué, voilà ce qui pourrait résumer une longue trail comme celle-là, la préparation a été si déroutante, le challenge semble tellement gros, plus de 3000 km à pied quand même ! Mais, si l’on se laisse aller et qu’on reste motivé même dans les moments difficiles, l’expérience nous permet d’apprécier avec tant de bonheur un lit chaud, une douche ou un vrai repas ! Des choses si futiles dans nos vies si chargées deviennent des plaisirs qu’on croyait acquis.
C'est quoi le confort ?
Sortir de sa zone de confort, la Te Araroa c’est plus que ça, c’est créer son confort à partir de 7 kilos qui se trouvent sur notre dos. C’est être satisfait de peu, ou plutôt peu devient beaucoup ! C’est aussi prendre des risques comme partir en « freestyle hiking » en plein milieu d’une réserve privée et suivre un gars armé d’un fusil pendant 5 km sans être vu pour, finalement, sortir sain et sauf de cette foutue mauvaise idée. C’est cogner chez les gens et faire de merveilleuses rencontres comme George et Natasha qui nous ont accueillis comme de vrais ami(e)s même si nous étions des randonneurs puants qui n’avaient pas pris de douche depuis une semaine.
C’est aussi d’improviser 100 km de vélo en une journée en se régalant de café glacé pour ensuite camper gratuitement à l’arrière d’un motel complètement vidé de notre journée.
De la pluie et une casquette qui s'envole au vent
Mais c’est aussi d’accepter que la Nouvelle-Zélande connaisse son pire été en 30 ans, qu’il pleut tout le temps, qu’il fait froid et que les conditions en montagnes sont abominables, mais c’est de continuer tout de même pour les quelques éclaircies majestueuses. C’est aussi de débattre pendant des heures dans un refuge à 1000 mètres d’altitude sur le fait de sortir pour atteindre le prochain ou non, malgré le vent qui semble vouloir arracher celui dans lequel nous sommes.
C’est aussi de parcourir les dangereuses Tararua Ranges sous un vent qui est tellement fort qu’il faut s’arrêter et se baisser pour ne pas être emporté par les bourrasques ! C’est aussi traverser 23 cours d’eau, dont 2 rivières intenses dans la même journée, en se demandant chaque fois si c’est le bon choix.
Un opossum peut nous manger ?
C’est entendre à deux heures du matin un opossum monter sur le balcon de la Parawai Lodge et marcher comme un humain d’une façon effrayante pour ensuite gratter la porte et monter sur le toit comme un fantôme ! C’est devenir plus fort physiquement et mentalement, c’est de vivre chaque jour une « unexpected journey », sans jamais savoir où nous allons dormir. C’est de manger tout le temps la même chose et faire une épicerie de 7 jours pour 35$ chacun.
De la boue, des bâtons et des bas mouillés
C’est aussi avoir les pieds complètement mouillés pendant 5 jours consécutifs et de s’en foutre royalement ou encore marcher dans la boue et ne même plus sans rendre compte.
C’est user au maximum nos souliers jusqu’à ce qu’ils soient plats en dessous et casser nos bâtons de marches à plusieurs reprises en mettant du tape un peu partout.
L'entraide, c'est la clé
Après plus de 1600 km parcourus, la Te Araroa c’est avant tout les merveilleuses personnes rencontrées et les Kiwis qui nous donnent le courage jour après jour de continuer. Merci à tous ceux et celles qui ont croisé notre route, merci à tous ceux et celles qui nous suivent de loin, merci, merci, merci.
L’île du Sud, on a très hâte de faire ta connaissance. 🙂